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coin ; et, derrière ce pupitre, il parut au petit Paul que c’était un homme imposant et vieux comme tout.

M. Feeder, bachelier ès lettres, qui était assis à un autre pupitre, avait mis sa serinette sur l’air de Virgile et était en train de le jouer lentement à quatre jeunes écoliers. Des quatre qui restaient, deux, se frappant convulsivement le front, étaient occupés à résoudre des problèmes mathématiques ; un autre, à force d’avoir pleuré, montrait un visage qui ressemblait à une croisée salie par la pluie et faisait des efforts désespérés pour sortir, avant le dîner, d’un dédale de difficultés obstinées ; le dernier restait devant sa tâche dans un état de muette stupéfaction et de profond désespoir, et il est probable qu’il était là comme pétrifié depuis le déjeuner.

La vue d’un nouvel élève ne causa pas la sensation qu’on aurait pu attendre. M. Feeder, bachelier ès lettres (qui avait l’habitude de se raser la tête pour avoir moins chaud, quoique ses cheveux fussent déjà fort clair-semés), tendit à Paul une main osseuse et lui dit qu’il était bien aise de le voir. Paul aurait voulu lui en dire autant, mais il n’eût pas été sincère. Puis, d’après les instructions de Cornélia, Paul donna une poignée de main aux quatre jeunes gens qui entouraient le pupitre de M. Feeder ; ensuite aux deux jeunes gens enfoncés dans leurs problèmes et qui en avaient la fièvre ; puis à celui qui gribouillait pour avoir fini à l’heure et qui était tout barbouillé d’encre, et enfin au jeune homme que la stupéfaction laissait inerte et glacé.

Paul avait été déjà présenté à Toots ; aussi ce dernier se contenta-t-il de pousser son gros rire en respirant bien fort, suivant sa coutume, puis il poursuivit son travail. Ce n’était pas une occupation très-sérieuse, car Toots, comme nous l’avons déjà fait entendre, avait fini son éducation, il savait désormais tout ce qu’il pouvait savoir, ce n’était pas grand’chose, et comme il avait cessé de fleurir, le docteur Blimber lui avait donné la permission de terminer, comme il l’entendrait, ses études, qui se bornaient à peu près à s’écrire à lui-même de longues lettres, qui étaient censées adressées par des personnes de distinction à M. P. Toots, esquire, à Brighton, comté de Sussex, et à conserver soigneusement ces lettres dans son pupitre.

Après cet échange de politesses, Cornélia conduisit Paul tout en haut de la maison ; ce fut tout un voyage, car Paul était obligé de poser ses deux pieds sur chaque marche avant