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ambitieuses et d’une présomption si incroyable, que M. Dombey n’y aurait jamais pu croire. Quand la lettre fut terminée, M. Dombey se remit à sa première place et tendit le papier à Walter.

« Donnez cela avant tout, demain matin, à M. Carker, dit-il. Il s’arrangera pour que l’un de mes gens tire votre oncle de sa fâcheuse position en payant le montant du billet ; il prendra aussi, pour le remboursement de la somme, tous les arrangements que nécessitera la position de votre oncle. Vous vous rappellerez que c’est M. Paul qui fait cela pour vous. »

Walter, tout ému de tenir dans ses mains le moyen de tirer son oncle de peine, aurait voulu exprimer sa reconnaissance et sa joie. M. Dombey l’arrêta.

« Vous vous rappelez, dit-il, que c’est M. Paul qui a tout fait. Je lui ai expliqué l’affaire et il la comprend ; cela suffit, qu’il n’en soit plus question. »

Et comme il indiquait la porte du doigt, Walter n’avait plus qu’à saluer et à se retirer. Miss Tox, s’apercevant que le capitaine allait faire de même, l’arrêta.

« Mon cher monsieur, dit-elle en s’adressant à M. Dombey dont la générosité l’avait touchée si profondément, elle et Mme Chick, que toutes deux en versaient des larmes abondantes, je crois que vous n’avez pas remarqué quelque chose. « Mille pardons, monsieur Dombey, mais je pense que dans la noblesse de votre caractère et dans son sublime essor, vous avez oublié un détail.

— En vérité, miss Tox ! dit M. Dombey.

— Le monsieur… à la… mécanique, poursuivit miss Tox en indiquant du regard le capitaine Cuttle, a laissé sur la table tout près de vous…

— Grand Dieu ! dit M. Dombey en repoussant loin de lui les richesses du capitaine, les balayant de la main comme il eût fait de véritables miettes de pain ; emportez ces objets. Je vous remercie, miss Tox ; je reconnais là votre jugement. Ayez la bonté, monsieur, d’emporter tous ces objets ! »

Le capitaine Cuttle vit bien qu’il n’avait qu’à obéir. Mais il fut vivement frappé de la grandeur d’âme de M. Dombey, qui refusait des trésors amoncelés sous sa main. Aussi, lorsqu’il eut déposé les petites cuillers et la pince à sucre dans une poche, les écus dans une autre, et qu’il eut fait rentrer tout doucement dans les profondeurs de son gousset sa grosse montre d’argent, il ne put s’empêcher de saisir dans son unique main la