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ture idéale, un être venu d’une sphère supérieure ; car je ne pouvais m’accoutumer à la pensée que Dora pût se confondre avec toutes les jeunes personnes appartenant à la prosaïque humanité.

La première chose que je fis après le départ de M. Daniel Peggoty, fut une promenade nocturne jusqu’à Norwood. Là, au clair de lune, je recommençai vingt fois le tour de la maison et du jardin de M. Spenlow. Pendant deux heures, je regardai à travers les fentes du palis, je me haussai au-dessus des pointes rouillées qui se hérissaient, j’envoyai des baisers à toutes les fenêtres où scintillait une lumière, et j’invoquai romanesquement la Nuit, la suppliant de protéger Dora… je ne sais plus contre quoi, peut-être contre le feu, peut-être contre les souris dont elle avait grand’peur.

J’étais si plein de mon amour, et il était si naturel que j’en fisse confidence à ma bonne Peggoty, qu’un soir que je la trouvai près de mon feu occupée à la réparation du linge de ma garde-robe, je lui fis part de mon grand secret. Peggoty fut vivement intéressée, mais je ne pus lui faire partager mes craintes et mes incertitudes. Elle était si prévenue en ma faveur qu’elle ne comprenait rien à mon décou-