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Nous descendîmes ensemble, et en entrant dans le salon, sa main toujours sur mon bras, il dit à ma mère : « Clara, mon amie, on ne vous fera plus de chagrin, j’espère : nous aurons bientôt amendé nos jeunes caprices. »

Dieu m’est témoin que j’aurais pu être amendé pour toute ma vie, que je serais même devenu tout autre peut-être, si en cette circonstance un mot de bonté m’eût été adressé. Oui, un mot d’encouragement et d’explication, un mot de pitié sur mon ignorance d’enfant, un mot qui m’assurât que j’étais le bienvenu à la maison, et que c’était toujours la maison pour moi ; ce mot-là aurait pu m’inspirer, à son égard, le dévoûment du cœur au lieu d’une obéissance hypocrite, le respect, du moins, au lieu de la haine. Il me sembla que ma mère était affligée de me voir là auprès d’elle, si effaré, si étranger, et que lorsque je me glissai jusqu’à une chaise, elle me suivit des yeux plus inquiète encore, s’apercevant peut-être qu’il n’y avait plus la même liberté dans ma démarche d’enfant… mais le mot ne fut pas prononcé, quoique ce fût bien le moment.

Nous dînâmes tous les trois ensemble. M. Murdstone paraissait très tendre pour ma