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une familiarité, tantôt avec une emphase exprimant également la consciencieuse conviction de leur importance. Je dois au moins transcrire le paragraphe de cette lettre où Charles Dickens me console de son laconisme en m’annonçant qu’il ne compte pas rester éternellement derrière le nuage. Il m’écrivait de Gênes, où il était alors, à la date du 10 avril 1845, et, après quelques observations sur la traduction des Carillons de Noël, il ajoutait :

« Je suis né à Portsmouth, dans le comté de Hampshire, en Angleterre, le 7 février 1812. Ce serait un plaisir pour moi de vous donner quelques détails sur ma vie, comme vous le désirez, n’était que j’ai formé le dessein, il y a long-temps, de l’écrire moi-même… cela vous amusera peut-être de savoir que j’ai lu maintes fois ma biographie, et que j’y ai trouvé quelque nouveau et bizarre incident qui m’était révélé à moi-même ; mais la plus bizarre et la plus neuve peut-être de toutes ces histoires a été écrite en français, etc., etc., etc. »

On comprendra qu’il serait peu convenable, après une pareille réponse, d’aller copier les biographes mal renseignés, que la réserve de Charles Dickens a mis en frais d’imagination à son sujet. Je n’oublierai jamais que je me fis autrefois une mauvaise querelle avec lord Byron, pour avoir introduit dans une notice en tête de ses œuvres je ne sais plus quelle anecdote, qui, certes, ne constituait pas un délit aussi grave que le fabuleux assassinat sérieusement attribué par Goëthe au poète anglais. Lord Byron, irascible de sa nature, ne ménageait pas toujours ses termes, et notre explication faillit aboutir à un duel… Je ne sais si Charles Dickens tire le pistolet aussi fatalement que le tirait Childe-Harold ; mais je m’en inquiète peu, voulant entretenir à tout prix les bons rapports qui me lient à un homme aussi aimé qu’admiré par tous ceux dont il est connu.