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tant à tout le monde, Jeannette voulant le faire tourner à gauche, M. Murdstone le tirant pour le faire avancer, Miss Murdstone donnant un coup de parasol à Jeannette, et cinq à six petits garçons, accourus au bruit, criant de toute la force de leurs poumons. Soudain ma tante reconnut le jeune malfaiteur qui était le gardien de l’âne et un de ses assaillants les plus invétérés, quoiqu’à peine âgé de dix ans. Elle s’élance à son tour sur la scène, le saisit, le fait prisonnier et le traîne avec sa veste par dessus la tête jusque dans le jardin d’où elle crie à Jeannette d’aller chercher les constables pour qu’il soit appréhendé au corps, jugé et exécuté sur place ! Cet épisode ne dura pas long-temps, toutefois ; car le jeune drôle, pétri de malice et qui savait des stratagèmes dont ma tante n’avait aucune idée, lui échappa bientôt et s’en alla en sifflant avec son âne, non sans laisser sur les plates-bandes les traces profondes de ses gros souliers ferrés.

Pendant cette dernière scène de l’action, Miss Murdstone avait mis pied à terre et elle attendait avec son frère, sur le seuil de la porte, que ma tante eût le loisir de les recevoir. Ma tante, un peu ébouriffée par le combat, rentra chez elle avec une froide dignité,