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père aussi s’imaginant que son pauvre Richard était ce qu’on appelle un idiot… En vérité, le père devait croire aussi avoir toute la sagesse du monde, pour porter un tel jugement… un idiot lui-même, je gage, ce père-là ! »

Ma tante ayant encore parlé avec un air de ferme conviction, je m’efforçai d’être convaincu comme elle et elle continua en ces termes :

« — J’intervins entre les deux frères et fis une offre au prétendu sage : votre frère a la tête saine, lui dis-je, plus saine que la vôtre aujourd’hui… plus saine, j’espère, que la vôtre ne sera jamais. Laissez-lui son petit revenu et qu’il vienne vivre avec moi. Je n’en ai pas peur, je ne suis pas fière, moi ; je suis prête à en prendre soin et je ne le maltraiterai pas comme l’ont maltraité certaines gens, sans parler des gardiens de la maison d’aliénés. » Là-dessus, grande discussion, querelle même entre le prétendu sage et moi… Mais je l’emportai à la fin et le pauvre Richard vint ici où il est resté depuis. C’est la créature la plus affectueuse et la plus docile qui se puisse voir : et pour donner un bon conseil… Ah ! il n’y a que moi qui sache ce qu’est l’esprit de cet homme. »