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c’est pour cela que je me suis enfui et que je viens à vous. De Londres à Douvres j’ai fait toute la route à pied, sans me coucher une seule fois dans un lit depuis le commencement du voyage ; j’ai été volé, dépouillé, et vous me voyez… »

Je ne sais d’où m’était venue la force d’en dire tant d’une seule haleine ; mais enfin cette force était épuisée. Je ne pus que faire un geste de mes mains pour appeler l’attention de ma tante sur mon aspect déguenillé, qui attestait suffisamment tout ce que j’avais dû souffrir, et, fondant en larmes, je suppose que je versai toutes celles qui s’étaient amassées en moi depuis une semaine.

Ma tante, dont les yeux fixés sur les miens n’exprimaient jusque-là que la plus singulière surprise, ne tint pas à l’explosion de ma douleur : elle se releva vivement, me saisit et m’entraîna dans le salon. Là, son premier soin fut d’ouvrir une grande armoire d’où elle tira diverses bouteilles et me fit avaler quelques gouttes de chacune. Il paraît qu’elle les avait prises au hasard, car je suis sûr d’avoir avalé successivement de l’eau d’anis, de la sauce aux anchois et du vinaigre. Ces cordiaux ne suffisant pas pour calmer mes sanglots, qui étaient de-