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s’essuyant avec un coin de son châle ce qui me parut du sang.

Cette aventure me causa une telle alarme, que du plus loin que j’apercevais ou croyais apercevoir un de ces chaudronniers, je me cachais jusqu’à ce qu’il eût passé, et cela m’arrivait assez souvent pour retarder sérieusement ma marche. Mais ce danger, comme tous les autres, ne m’arrêta pas. L’image de ma mère était toujours à mes côtés. Elle était avec moi dans le champ de houblon où je dormis cette nuit-là ; elle y était à mon réveil ; elle m’accompagna le lendemain encore toute la journée, si bien que je ne saurais la séparer de la perspective où m’apparurent aussi le profil de la vénérable cathédrale de Cantorbéry, les portes gothiques de la ville, les grolles et les corneilles voltigeant au-dessus des tours. L’image protectrice fit encore luire un rayon d’espérance sur les dunes solitaires de Douvres : c’était le sixième jour ; mais, chose étrange !… ce jour-là, l’image sembla s’évanouir comme un rêve, me laissant à demi-nu, avec des souliers en lambeaux et découragé, au moment où je touchai à ce but si désiré de ma fuite.

Je me dirigeai du côté du port et m’adressai