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jusqu’à Chatham qui, tel qu’il m’apparut ce soir-là, serait encore un chaos de terre crayeuse, de pont-levis et de navires sans mâts, avec une toiture comme celle de l’arche de Noé ; je me glissai sur une espèce de batterie revêtue de gazon, qui dominait un sentier creux où une sentinelle faisait sa faction. Je me couchai là, près d’un canon, heureux d’entendre le bruit régulier des pas du factionnaire, quoiqu’il ne se doutât pas plus de mon voisinage que les écoliers de Salem-House ne s’étaient douté, la veille, qu’ils avaient si près d’eux un de leurs anciens condisciples. Je dormis profondément jusqu’au lendemain.

Je me réveillai, cette fois, au son des tambours, et il me semblait, en entendant de tous côtés la marche des détachements de troupes, qu’une armée entière m’entourait : je descendis de ma batterie vers la longue rue étroite de Chatham ; mais, à la raideur de mes pieds, je compris que si je voulais pouvoir arriver jusqu’à Douvres, je ferais prudemment de ménager, ce jour-là, mes forces, en me contentant d’une courte étape. Je calculai aussi mes finances, et résolus de commencer mes opérations par la vente de ma veste. Je m’en dépouillai donc pour apprendre à m’en passer,