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fléchis que j’avais tout juste dans ma poche la somme de trois pence (30 centimes). Comment en avais-je même autant ? je ne sais trop, en vérité, puisque c’était le samedi soir. Je commençai à me figurer l’effet que produirait, dans un jour ou deux, sur les lecteurs de journaux, la nouvelle qu’on m’avait trouvé mort au pied d’une haie. Un moment après je passai devant une petite boutique sur la fenêtre de laquelle était écrit qu’on achetait la garde-robe des dames et des messieurs, un prix honnête étant garanti pour les chiffons, les os et les débris de la cuisine. Le maître de cette boutique, assis en manche de chemise sur le banc à côté de sa porte, fumait sa pipe. En voyant tant d’habits, de pantalons et autres vêtements suspendus au plafond, on aurait pu penser, à la lueur de deux chandelles fumeuses qui composaient tout l’éclairage intérieur, que c’étaient les dépouilles de tous ses ennemis que cet homme avait tués, et qu’il jouissait tranquillement de sa vengeance.

Mes dernières relations avec la famille Micawber me suggérèrent que je pourrais trouver là de quoi écarter de moi pendant quelque temps, le loup de la faim. Je m’éloignai jusqu’à la plus proche ruelle, j’ôtai mon gilet, le