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du lord-maire, il marchait dans le cortège avec une toque de velours noir. Passant de là aux renseignements sur nos collaborateurs, il nomma le principal d’entre eux Pomme-de-terre-farineuse. Je découvris plus tard que ce nom, qui me semblait assez extraordinaire, n’était ni un nom de famille ni un nom de baptême, mais un sobriquet indiquant le teint pâle ou farineux de ce brave jeune homme, dont le père avait deux professions qu’il exerçait, l’une de jour, l’autre de nuit. Batelier sur la Tamise, il était pompier attaché à l’un des grands théâtres, où une petite sœur de Pomme-de-terre-farineuse jouait les lutins dans les pantomimes.

Je me sentis secrètement humilié de ces nouveaux compagnons, les comparant aux petits amis de ma première enfance si heureuse, et à ceux du pensionnat, à Traddles, à Steerforth surtout. Plus d’espoir pour moi, me disais-je, de devenir jamais un homme instruit et distingué ! Quelle honte, quelle angoisse pour mon jeune cœur qui avait sa petite ambition et son petit orgueil ! On s’en ferait difficilement une idée, et mes larmes se mêlèrent souvent à l’eau avec laquelle je rinçais les bouteilles, lorsque je croyais ne pas être vu.