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affligé. En remarquant que mes larmes cessaient déjà de couler au bout de quelques heures, je me demandai avec inquiétude si elles seraient toutes taries pour le jour des funérailles… car on m’attendait pour conduire le deuil : j’éprouvais un singulier sentiment d’importance, comme si ma perte et ma douleur me revêtaient d’une dignité parmi les autres élèves.

Si jamais enfant fut pénétré d’une affliction sincère, c’est moi. Mais je me souviens que cesse importance me causait une sorte de satisfaction lorsque, dans l’après-midi, je traversai la cour et que je vis mes camarades me regarder par les fenêtres en se rendant à leurs classes : je me sentis distingué, je pris un air plus triste et ralentis le pas ! La classe finie, ils vinrent me parler, et je me trouvai un bon et modeste enfant de leur répondre sans orgueil et de les reconnaître tous comme auparavant.

Je partis le soir par une lourde diligence de nuit, qui desservait principalement les petites localités intermédiaires de la route. Je ne songeais guère, en quittant Salem-House, que je ne reverrais plus le pensionnat. Nous n’arrivâmes à Yarmouth que le lendemain