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ses gardes pour elle-même, en même temps qu’elle suivait tous mes mouvements en redoutant l’effet qu’ils pouvaient produire sur les autres. Je résolus donc de me tenir à l’écart autant que possible. Maintes fois j’entendis sonner la cloche dans le silence de ma chambre, enveloppé de ma petite redingote, ou gardant le lit, occupé à lire un de mes romans.

Quelquefois, dans la soirée, j’allais m’asseoir avec Peggoty dans la cuisine. Là, je me retrouvais à mon aise et n’avais plus peur de me montrer ce que j’étais naturellement. Mais on n’approuva, au salon, aucune de ces deux ressources, et l’esprit de tyrannie qui y régnait chercha à me priver de l’une et de l’autre. On me jugeait encore nécessaire à l’éducation de ma pauvre mère, et comme un moyen d’éprouver ses progrès à l’école de la fermeté. Mes absences furent donc un nouveau grief contre moi.

« — David, » me dit M. Murdstone un jour qu’après le dîner j’allais quitter le salon comme à l’ordinaire, « je suis fâché d’observer que vous êtes d’un caractère boudeur et sombre.

» — Aussi sombre qu’un ours, » dit Miss Murdstone.

Je ne bougeai pas et baissai la tête.