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et je donnerais tout au monde pour qu’il me fût permis de dormir ; mais M. Creakle vient d’entrer, et mon œil le suit, mon œil à demi-ouvert, comme celui d’un jeune hibou luttant contre la lumière. Je succombe enfin, et incline sur mon livre ma tête accablée, croyant l’observer toujours dans mon sommeil ; lui, cependant, est venu sournoisement par derrière, et un coup de canne me réveille en sursaut.

Me voici dans la cour de récréation, ne pouvant l’apercevoir, mais poursuivi par la conviction qu’il ne me perd pas de vue. À une courte distance est la fenêtre de la salle où je sais qu’il est à dîner, et c’est cette fenêtre qui me fascine. Montre-t-il son visage à travers les carreaux, le mien prend une expression de soumission suppliante. Si la fenêtre s’ouvre, le plus hardi des élèves (excepté Steerforth) interrompt le jeu le plus animé. Un jour, Traddles (le plus chanceux enfant du monde) brisa, avec sa balle, une vitre de cette fenêtre. Je frémis au souvenir terrible de cet accident, comme si la balle bondissait de nouveau sur le front sacré de M. Creakle.

Pauvre Traddles ! à la foi le plus gai et le plus misérable de tout le pensionnat, il était