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vent oublié qu’il y a, pour les républiques comme pour les rois, une morale au-dessus de la loi des majorités ; son respect pour l’indépendance individuelle n’a pu aller jusqu’à trouver de bon goût certaines habitudes américaines opposées à l’étiquette ou à la dignité de l’éducation anglaise. Sans citer aucun nom, sans tomber dans la personnalité, Charles Dickens a été tour à tour sévère et moqueur pour ses hôtes. — Il en est résulté des répliques amères : avec son goût pour les litres bizarres, faisant peut-être allusion à cette banqueroute qui a inspiré de si amères récriminations au révérend Sydney Smith, Charles Dickens intitula sa relation : Notes américaines mises dans la circulation générale. Plus d’un champion de l’honneur de l’Union s’est vanté de lui avoir rendu en usure la monnaie de son papier. — Mais il est difficile d’avoir le dernier mot avec un auteur qui a autant de ressources dans l’esprit que Charles Dickens : une véritable satire des États-Unis a été intercalée par lui, sous forme d’épisode, dans les Aventures de Martin Chuzzlewit.

En 1844, Charles Dickens conçut le projet de passer une année en Italie. Il traversa rapidement la France de Boulogne à Marseille, où il s’embarqua pour aller établir ses quartiers d’hiver à Gènes, dans cette même cité où autrefois lord Byron avait élu domicile. Le romancier a publié ses pérégrinations péninsulaires, et c’est un curieux petit volume que celui où il applique à Gênes, à Florence, à Milan, à Rome, etc., le microscope de son observation. Après tant de descriptions pompeuses, après tant de déclamations enthousiastes qui nous parlent des ruines poétiques de l’Italie, cette reine des arts, avec la même sensibilité officielle qui inspire les faiseurs d’oraison funèbre sur le catafalque de quelque personne royale, il est piquant de lire les impressions vraies d’un auteur fidèle à son caractère et à la spécialité de son point de vue[1].

  1. Ce petit volume a été traduit en partie dans la Revue Britannique.