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kens, est dû à l’air de bonne humeur et de franchise qui anime sa physionomie. Cette bonne humeur et cette franchise sont l’expression de l’auteur heureux, à qui le succès est venu naturellement, qui l’a attendu sans impatience maladive, qui ne l’a pas hâté par le charlatanisme ou l’intrigue, qui l’a accepté sans sotte vanité, et qui sait, par sa bonne grâce, se le faire pardonner auprès de ceux dont sa fécondité déroute la concurrence. Rien qu’à le voir, on devine qu’il n’a ni envieux ni ennemis, et qu’il compte beaucoup d’amis. En effet, interrogez ses compatriotes, sa popularité n’est pas bornée à un parti, — quoiqu’il ait sa couleur politique ; — cette popularité le suit dans les salons du grand monde, où c’est à qui lui serrera la main, et dans les meetings, où il est salué par d’unanimes applaudissements dès qu’il paraît pour prendre la parole, soit à l’Institut des ouvriers de Manchester, soit dans une assemblée tenue à Londres pour provoquer l’abolition de la peine capitale, soit plus récemment, lorsqu’il a présidé au banquet annuel de la Société fondée pour secourir les auteurs et les artistes indigents.

Jusqu’à ce jour auteur favori et privilégié, Charles Dickens n’a rencontré dans la presse périodique qu’une critique bienveillante, sauf peut-être un article du Times, bien moins à son adresse qu’à celle d’un journal rival, qui avait spéculé sur sa collaboration exclusive. Sir Walter Scott paya plus cher le simple soupçon d’avoir prêté sa plume au rédacteur long-temps anonyme du John-Bull, Quant à nous, en France, notre admiration pour Charles Dickens ne saurait aller jusqu’à sacrifier les droits de ce goût traditionnel, qui n’accorde aux auteurs étrangers leurs grandes lettres de naturalisation dans notre littérature, qu’avec toutes les réserves nationales. Heureusement le romancier anglais lui-même n’a jamais prétendu interdire la discussion impartiale de son talent. Il sait à quelles conditions on règne en littérature, n’importe dans quel genre, et la modestie qu’il a mise à se