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Quand on voit Charles Dickens comme je l’ai vu dans son petit hôtel de Devonshire-Terrace, si poli, si gracieux, si naturel et parlant de ses enfants plus volontiers que de ses ouvrages, on a bientôt oublié toutes les conjectures de ses biographes, on oublie même l’auteur dans le gentleman, et l’on se livre à lui comme si on était depuis longtemps de ses amis. Il faudrait réellement avoir une bien mauvaise conscience pour ne pas se sentir à son aise avec ce charmant conteur, se rappellerait-on de temps en temps que cet œil qui vous sourit avec une bienveillance si courtoise, est le même dont le regard microscopique pénètre dans les plus intimes replis du cœur.

Ce fut en 1848 que je fis ma première visite à Charles Dickens dans sa maison de Londres : je me présentai moi-même, et je lui présentai en même temps un ami, mon compagnon de voyage, qu’il n’accueillit pas moins gracieusement, malgré sa réputation de critique difficile et cet infernal pseudonyme qui a fait se donner au diable maints romanciers de France et d’Angleterre. Sans chercher d’intermédiaire et me rappelant l’accueil que j’avais trouvé à Édimbourg, vingt ans auparavant, auprès de sir Walter Scott, en lui offrant la première traduction française de ses poèmes, j’envoyai à Charles Dickens les numéros de la Revue Britannique qui contenaient l’épisode historique des troubles de 1780, intitulé la Cloche de Tocsin, en sollicitant la permission d’aller sonner à sa porte avec mon ami Old-Nick. La réponse ne se fit pas attendre, et la voici :

Devonshire-Terrace, York-Gate, Regent’s Park.
7 juin 1843.
« Mon cher Monsieur,

» Je serai vraiment heureux de recevoir votre visite et celle d’un gentleman aussi universellement connu que le