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chose puisse faire tant de plaisir ! vraiment ! vraiment ! Mais promettez-moi que le jour où vous trouverez quelque chose de mieux vous le prendrez, n’est-ce pas ? Vous m’en donnez votre parole ? dit le docteur du ton avec lequel il en appelait autrefois à notre honneur, en classe, quand nous étions petits garçons.

— Je vous en donne ma parole, monsieur, répliquai- je aussi comme nous répondions en classe autrefois.

— En en cas, c’est une affaire faite, dit le docteur en me frappant sur l’épaule et en continuant de s’y appuyer pendant notre promenade.

— Et je serais encore vingt fois plus heureux de penser, lui dis-je avec une petite flatterie innocente, j’espère…, si vous m’occupez au Dictionnaire. »

Le docteur s’arrêta, me frappa de nouveau sur l’épaule en souriant, et s’écria d’un air de triomphe ravissant à voir, comme si j’étais un puits de sagacité humaine :

« Vous l’avez deviné, mon cher ami. C’est le Dictionnaire. »

Comment aurait-il pu être question d’autre chose ? Ses poches en étaient pleines comme sa tête. Le Dictionnaire lui sortait par tous les pores. Il me dit que depuis qu’il avait renoncé à sa pension, son travail avançait de la manière la plus rapide, et que rien ne lui convenait mieux que les heures de travail que je lui proposais, attendu qu’il avait l’habitude de se promener dans le milieu du jour en méditant à son aise. Ses papiers étaient un peu en désordre pour le moment, grâce à M. Jack Maldon qui lui avait offert dernièrement ses services comme secrétaire, et qui n’avait pas l’habitude de cette occupation ; mais nous aurions bientôt remis tout cela en état, et nous marcherions rondement. Je trouvai plus tard, quand nous fûmes tout de bon à l’œuvre, que les efforts de M. Jack Maldon me donnaient plus de peine que je ne m’y étais attendu, vu qu’il ne s’était pas borné à faire de nombreuses méprises, mais qu’il avait dessiné tant de soldats et de têtes de femmes sur les manuscrits du docteur, que je me trouvais parfois plongé dans un dédale inextricable.

Le docteur était enchanté de la perspective de m’avoir pour collaborateur de son fameux ouvrage, et il fut convenu que nous commencerions dès le lendemain à sept heures. Nous devions travailler deux heures tous les matins et deux ou trois heures tous les soirs, excepté le samedi qui serait un jour de congé pour moi. Je devais naturellement me reposer aussi le dimanche ; la besogne n’était donc pas bien pénible.