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Ah ! Dieu du ciel ! comme nous sommes polis, s’écria miss Mowcher en faisant un petit effort peur couvrir son large visage avec sa petite main. Avouez qu’il y a terriblement de blague et de cajoleries dans ce monde. »

Ceci nous était adressé en manière de confidence à tous les deux, tandis que la petite main quittait le visage et que le petit bras disparaissait encore tout entier dans le sac.

« Que voulez-vous dire, miss Mowcher ? demanda Steerforth. Ah ah ! ah ! quel tas d’enjôleurs nous faisons, n’est-ce pas, mon cher enfant ? répliqua la petite femme cherchant dans le sac, un œil en l’air et la tête de côté. Voyez donc ! dit-elle en tirant un petit paquet : « rognures des ongles d’un prince russe, » le prince Alphabet-Sens-Dessus-Dessous, comme je l’appelle, car son nom comprend toutes les lettres de l’alphabet, pêle-mêle.

— Le prince russe est un de vos clients, n’est-ce pas ? dit Steerforth.

— Je crois bien ! mon fils, répliqua miss Mowcher ; je lui coupe les ongles deux fois par semaine aux mains et aux pieds !

— Il paye bien, j’espère ? dit Steerforth.

— Il parle du nez, mais il paye bien, dit miss Mowcher. Il n’y regarde pas de près comme tous vos blancs-becs, à preuve la longueur de ses moustaches, rouges par nature, mais noires grâce à l’art.

— Grâce à votre art, naturellement ? » dit Steerforth.

Miss Mowcher cligna de l’œil en signe d’assentiment.

« Il a bien été obligé de m’envoyer chercher ; il ne pouvait faire autrement. Le climat faisait tort à la teinture ; cela pouvait encore aller en Russie, mais ici pas. Vous n’avez jamais vu de prince aussi couleur de rouille que lui quand je l’ai entrepris. Une barre de vieille ferraille.

— Est-ce que c’est lui que vous appeliez un enjôleur tout à l’heure ? demanda Steerforth.

— Oh ! vous êtes une fine mouche ! répliqua miss Mowcher en branlant vivement la tête. J’ai dit que nous faisions tous en général un tas d’enjôleurs ; et je vous ai montré les ongles du prince à preuve. C’est que, voyez-vous, les ongles du prince me servent plus dans les familles que tous mes talents ensemble. Je les porte toujours avec moi : C’est ma lettre de recommandation. Si miss Mowcher coupe les ongles du prince, tout est dit. Je les donne aux jeunes personnes qui les mettent