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notre solde, Fipp, le charretier, qui passait toujours le premier, entra dans le bureau ; je donnai alors une poignée de main à Mick Walter en le priant, quand ce serait mon tour, de passer à la caisse, de dire à M. Quinion que j’étais allé porter ma malle chez Fipp ; je dis adieu à Fécule-de-pommes- de-terre, et je partis.

Mon bagage était resté à mon ancien logement de l’autre côté de l’eau ; j’avais préparé pour ma malle une adresse écrite sur le dos d’une des cartes d’expédition que nous clouions sur nos caisses : « M. David, bureau restant, aux Messageries ; Douvres. » J’avais cette carte dans ma poche, et je comptais la fixer sur ma malle dès que je l’aurais retirée de la maison ; chemin faisant, je regardais autour de moi pour voir si je ne trouverais pas quelqu’un qui pût m’aider à porter mon bagage au bureau de la diligence.

J’aperçus un jeune homme avec de longues jambes, et une très-petite charrette attelée d’un âne, qui se tenait près de l’obélisque sur la route de Blackfriars ; je rencontrai son regard en passant, et il me demanda si je le reconnaîtrais bien une autre fois, faisant probablement allusion à la manière dont je l’avais examiné ; je me hâtai de l’assurer que ce n’était pas une impolitesse, mais que je me demandais s’il ne voudrait pas se charger d’une commission.

« Quelle commission ? demanda le jeune homme.

— De porter une malle, répondis-je.

— Quelle malle ?

— La mienne. J’expliquai qu’elle était dans une maison au bout de la rue, et que je serais enchanté qu’il voulût bien la porter pour six pence au bureau de la diligence de Douvres.

— Va pour six pence ! » dit mon compagnon aux longues jambes, et il monta à l’instant même dans sa charrette qui se composait de trois planches posées sur des roues, et partit si vite dans la direction indiquée que c’était tout ce que je pouvais faire que de suivre l’âne.

Le jeune homme avait un air insolent qui me déplaisait ; je n’aimais pas non plus la manière dont il mâchait un brin de paille tout en parlant, mais le marché était fait ; je le fis donc monter dans la chambre que je quittais, il prit la malle, la descendit et la mit dans sa charrette. Je ne me souciais pas de mettre encore l’adresse, de peur que quelque membre de la famille de mon propriétaire ne devinât mes desseins ; je priai donc le jeune homme de s’arrêter quand il serait arrivé devant