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bonne heure, |e rejoignis toute la famille an bureau de la diligence, et je les vis avec tristesse prendre leurs places sur l’impériale.

« Monsieur Copperfield, dit mistress Micawber, que Dieu vous bénisse ! Je ne pourrai jamais oublier ce que vous avez été pour nous, et je ne le voudrais pas quand je le pourrais.

— Copperfleld, dit M. Micawber, adieu ! que le bonheur et la prospérité voua accompagnent ! Si dans la suite des années qui, s’écouleront je pouvais croire que mon sort infortuné vous a servi de leçon, je sentirais que je n’ai pas occupé inutilement la place d’un autre homme ici-bas. En cas qu’une bonne chance se rencontre (et j’y compte un peu), je serai extrêmement heureux s’il est jamais en mon pouvoir de vous venir en aide dans vos perspectives d’avenir. »

Je pense que mistress Micawber qui était assise sur l’impériale avec les enfants, et qui me vit debout sur le chemin, les regardant tristement, s’avisa tout d’un coup que j’étais réellement bien petit et bien faible. Je le crois parce qu’elle me fit signe de monter près d’elle avec une expression d’affection maternelle, et qu’elle me prit dans ses bras et m’embrassa comme elle aurait pu embrasser son fils. Je n’eus que le temps de redescendre avant le départ de la diligence, et je pouvais à peine distinguer mes amis au milieu des mouchoirs qu’ils agitaient. En une minute tout disparut. Nous restions au milieu de la route, l’orpheline et moi, nous regardant tristement, puis après une poignée de mains, elle prit le chemin de l’hôpital de Saint-Luc ; et moi, j’allai commencer ma journée chez Murdstone et Grinby.

Mais je n’avais pas l’intention de continuer à mener une vie si pénible. J’étais décidé à m’enfuir, à aller, d’une manière ou d’une autre, trouver à la campagne la seule parente que j’eusse au monde, et à raconter mon histoire à miss Betsy.

J’ai déjà fait observer que je ne savais pas comment ce projet désespéré avait pris naissance dans mon esprit, mais une fois là, ce fut fini, et ma détermination resta aussi inébranlable que tous les partis que j’ai pu contracter depuis dans ma vie. Je ne suis pas sûr que mes espérances fussent très-vives, mais j’étais décidé à mettre mon projet à exécution.

Cent fois depuis la nuit où j’avais conçu cette idée, j’avais roulé dans mon esprit l’histoire de ma naissance que j’aimais tant autrefois à me faire raconter par ma pauvre mère, et que je savais si bien par cœur. Ma tante y faisait une apparition