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LE CRICRI DU FOYER.

longtemps tout fait pour détruire sa propre identité et celle de tous les objets qui s’y rattachaient !

Caleb reprit son travail : « Allons, dit-il en reculant d’un pas ou deux pour mieux juger la perspective ; nous voici aussi près de la réalité que six fois deux liards sont près de six sous ! Quel dommage que la maison vous présente tout d’abord sa façade ! S’il y avait seulement un escalier et des portes régulières pour entrer dans les chambres ! Mais c’est là le pire côté de mon métier. Je suis toujours à me tromper et à m’abuser moi-même.

— Vous parlez bien bas, seriez-vous fatigué, mon père ?

— Fatigué ! s’écria Caleb avec un élan d’animation. Qu’est-ce qui me fatiguerait, Berthe ? je ne fus jamais fatigué. Qu’est-ce que cela signifie ?

Caleb s’était laissé surprendre à imiter involontairement deux bonshommes qui bâillaient et tendaient les bras sur la tablette de la cheminée, deux vrais types d’une lassitude éternelle par leurs gestes et leur attitude ; — pour donner plus d’emphase à ses paroles, il se mit à fredonner un couplet de chanson. C’était une chanson bachique, un refrain sur le rouge-bord, et qu’il entonna avec une affectation de bon vivant qui donna aux traits de son visage une expression mille fois plus maigre et plus soucieuse.

« Eh donc ! vous chantez, je crois ! dit M. Tackleton,