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LES CARILLONS.

Il sentit sa main faiblir : les fantômes se taisaient encore.

« Ayez pitié d’elle ! s’écria-t-il, car cet épouvantable crime lui fut inspiré par l’égarement de son amour même, et l’amour le plus fort et le plus profond que nous puissions connaître, créatures déchues que nous sommes… Songez à quel excès de misère elle a été réduite lorsque de pareilles semences portent de pareils fruits… Le ciel l’avait fait naître pour être bonne. Il n’est pas de tendre mère qui ne puisse être amenée là si elle avait souffert comme celle-ci… Oh ! ayez pitié de ma fille, qui dans cet acte même croit se dévouer à son enfant, et risque en mourant le salut de son âme immortelle pour le sauver. »

Elle était dans ses bras ; Trotty l’y tenait embrassée ; il avait la vigueur d’un géant.

« Je vois le génie des carillons parmi vous, s’écria Trotty en désignant son guide et parlant avec l’accent d’une sorte d’inspiration qu’il puisait dans le regard que lui adressaient les fantômes ; je sais à présent que notre héritage est tenu en réserve pour nous dans les trésors du Temps… Je sais qu’un jour le Temps lui-même doit se lever comme une vaste mer, qui balaiera devant elle tous ceux qui nous outragent ou nous oppriment. J’aperçois de loin ses premiers flots ; je sais que nous devons avoir confiance et espoir, ne pas douter de nous-mêmes ni douter des bons sentiments de nos semblables. C’est