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LES CARILLONS.

Depuis quelques minutes, le sang de Richard lui montait à la tête ; s’il eût osé, il eût dit à Meg : N’approchez pas ; mais il se contint et se contenta de se placer près d’elle. Trotty pressait encore la main de sa fille sous son bras ; mais, à l’égarement de ses yeux, on eût dit qu’il faisait un rêve.

« Maintenant, je vais vous donner un mot ou deux de bon conseil, dit l’alderman avec son ton d’aisance affable ; c’est mon métier de conseiller, vous savez, parce que je suis juge de paix. Vous savez que je suis juge de paix, n’est-ce pas ?

— Oui, » répondit Meg timidement. Mais tout le monde savait que l’alderman Cute était juge de paix. Un actif juge de paix comme lui ! il était impossible qu’il échappât à l’attention du public, lui, l’astre de cette brillante constellation.

« Vous allez vous marier, dites-vous, poursuivit l’alderman ; c’est chose très-inconvenante et indélicate de la part d’une personne de votre sexe. Mais n’importe. Après que vous serez mariée, vous vous querellerez avec votre mari, et deviendrez malheureuse. Vous pouvez penser le contraire : mais cela sera, puisque je vous le dis. Or, je vous avertis charitablement que j’ai résolu de supprimer les femmes malheureuses. Arrangez-vous pour ne pas être amenée devant moi. Vous aurez des enfants… des garçons. Ces enfants deviendront de mauvais sujets tout naturellement, et ils iront courir les rues