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LES CARILLONS.

tique église, bien au-dessus des lumières et des bruits, sous les ombres des nuages qui la couvrent de leur dais flottant, que la nuit a des heures étranges et terribles !… Or, c’est dans le clocher d’une antique église qu’étaient les cloches dont je raconte l’histoire.

Ces cloches étaient bien vieilles, croyez-moi. Il y avait des siècles que ces cloches avaient été baptisées par de saints évêques, un si grand nombre de siècles, que le registre de leur baptême était perdu depuis longtemps… avant mémoire d’homme : aussi personne ne savait leurs noms ; elles avaient eu cependant leurs parrains et leurs marraines, ces cloches (pour ma part, j’aimerais mieux risquer la responsabilité d’être le parrain d’une cloche que d’un enfant), et elles avaient eu sans doute aussi leurs coupes d’argent. Mais le temps avait passé avec sa faux sur leurs parrains, Henri VIII avait fondu les coupes d’argent de leur baptême, et elles restaient suspendues sans coupes et sans noms dans la tour de l’église[1].

Ce n’étaient pas des cloches muettes, malgré tout ;

  1. « Autrefois on baptisait les cloches avec une grande solennité ! Lorsqu’on baptise les enfants, en Angleterre, c’est l’usage que les parrains et les marraines leur donnent des mugs (petits pots, gobelets ou petites coupes ) d’argent. Appliquant aux cloches l’idée complète du baptême, je dis que Henri VIII fit fondre leurs mugs, parce que le monarque dépouilla les églises de leurs ornements, de leur or et de leur argent » Note envoyée au traducteur par M. Charles Dickens, février 1846.