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jaune, avec une huppe semblable à une laitue sur le haut de la tête ; le voilà ! « Pauvre Robinson Crusoé ! » lui criait-il quand il revint au logis, après avoir fait le tour de l’île en canot. « Pauvre Robinson Crusoé, où avez-vous été, Robinson Crusoé ? » L’homme croyait rêver, mais non, il ne rêvait pas. C’était le perroquet, vous savez. Voilà Vendredi courant à la petite baie pour sauver sa vie ! Allons, vite, courage, houp ! »

Puis, passant d’un sujet à un autre avec une rapidité qui n’était point dans son caractère, touché de compassion pour cet autre lui-même qui lisait ces contes : « Pauvre enfant ! » répéta-t-il, et il se mit encore à pleurer.

« Je voudrais, murmura Scrooge en mettant la main dans sa poche et en regardant autour de lui après s’être essuyé les yeux avec sa manche ; mais il est trop tard maintenant.

― Qu’y a-t-il ? demanda l’esprit.

― Rien, dit Scrooge, rien. Je pensais à un enfant qui chantait un Noël hier soir à ma porte ; je voudrais lui avoir donné quelque chose : voilà tout. »

Le fantôme sourit d’un air pensif, et de la main lui fit signe de se taire en disant : « Voyons un autre Noël. »

À ces mots, Scrooge vit son autre lui-même déjà grandi, et la salle devint un peu plus sombre et un peu plus sale. Les panneaux s’étaient fendillés, les fenêtres étaient crevassées, des fragments de plâtre étaient tombés du plafond, et les lattes se montraient à découvert. Mais comment tous ces changements à vue se faisaient-ils ? Scrooge ne le savait pas plus que vous. Il savait seulement que c’était exact, que tout s’était passé comme cela, qu’il se trouvait là, seul encore, tandis que tous les autres jeunes garçons étaient allés passer les joyeux jours de fête dans leurs familles.

Maintenant il ne lisait plus, mais se promenait de long en large en proie au désespoir. Scrooge regarda le spectre ; puis, avec un triste hochement de tête, jeta du côté de la porte un coup d’œil plein d’anxiété.

Elle s’ouvrit ; et une petite fille, beaucoup plus jeune que l’écolier, entra comme un trait ; elle passa ses bras autour de son cou et l’embrassa plusieurs fois en lui disant : « Cher, cher frère !

« Je suis venue pour vous emmener à la maison, cher frère, dit-elle en frappant ses petites mains l’une contre l’autre, et toute courbée en deux à force de rire. Vous emmener à la maison, à la maison, à la maison !

― À la maison, petite Fanny ? répéta l’enfant.