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qu’il imprime à son cou ; il est obstiné comme un païen et s’entête à ne vouloir pas circuler.

— Mais où c’qu’on veut donc qu’j’aille ? reprend l’infortuné en se tirant les cheveux avec désespoir et en frappant de son pied nu sur le carreau.

— Allons ! allons ! pas de ces manières-là, ou j’aurai bientôt fait d’en finir, dit le constable en le secouant d’un air impassible. Ma consigne est de vous faire circuler, je vous l’ai dit cinq cents fois. Ainsi donc, pas de raisons.

— Mais où c’qu’i faut qu’j’aille ?

— Vraiment, constable, dit M. Snagsby en faisant entendre derrière sa main sa toux de perplexité ; vraiment, c’est une question à faire : où voulez-vous qu’il aille ?

— Mes instructions n’en parlent pas, répond le constable, elles disent seulement de faire circuler ce garçon. »

Entendez-vous, Jo ? Il ne vous sert à rien, ainsi qu’à vos pareils, d’invoquer en cette occasion l’exemple que vous ont donné les astres du ciel parlementaire qui, depuis quelques années sont restés immobiles ; le grand principe du mouvement n’en demeure pas moins à votre usage ; allez ! marchez ! c’est le but de votre existence : vous êtes fait pour ça. Circulez : mais ne vous sauvez pas de ce monde, pourtant, car les grandes lumières du firmament parlementaire dont je vous parlais tout à l’heure sont d’accord que vous n’en avez pas le droit. Allez, trottez, circulez.

M. Snagsby n’a rien à dire à cela et ne dit rien en effet ; mais la toux qu’il fait entendre exprime assez qu’il n’aperçoit aucune issue à la situation. M. et Mme Chadband et mistress Snagsby, attirés par le bruit des voix, apparaissent dans l’escalier, et comme Guster n’a pas quitté la place, toute la famille est rassemblée.

«  Toute la question est celle-ci, monsieur, dit le constable au papetier : Connaissez-vous cet individu-là, ainsi qu’il le prétend ?

— Pas le moins du monde, s’écrie Mme Snagsby avec vivacité du point élevé où elle se trouve.

— Ma petite femme ! s’écrie à son tour le papetier en levant les yeux vers mistress Snagsby ; permettez, mon amour ; un instant de patience, cher trésor ; je connais un peu ce garçon, et je puis dire qu’il n’y a pas le moindre mal dans ce que je puis savoir de lui. Au contraire, ajoute-t-il en s’adressant au constable, à qui M. Snagsby raconte ce qu’il sait du pauvre Jo, sans parler toutefois de la demi-couronne qu’il lui avait donnée.