Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/361

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour être jetée à la poste avec la correspondance du jour. Ceci terminé, M. Georges dit un adieu cordial à tous les membres de la famille et se dispose à partir, lorsque son frère ne voulant pas encore le quitter, lui offre de le conduire en voiture découverte, à l’endroit où il doit coucher, d’y rester avec lui jusqu’au lendemain matin, et de faire monter le vieux gris de Chesney-Wold par un domestique, pendant cette première partie du voyage. Cette proposition, joyeusement acceptée, est suivie d’une course fort agréable en tilbury, puis d’un dîner et d’un déjeuner qui ne le sont pas moins, le tout entremêlé de conversation et d’épanchements fraternels. Enfin, après force poignées de main échangées une dernière fois, ils se séparent, le maître de forges tournant son visage du côté de la fumée et des fournaises, le sergent du côté de la verte campagne ; et de bonne heure encore, dans l’après-midi, le bruit étouffé de son trot pesant se fait entendre sur le gazon de l’avenue qu’il franchit sous les vieux ormes, accompagné du cliquetis imaginaire de l’équipement militaire qu’il croit porter encore.


CHAPITRE XXXIV.

Narration d’Esther.

Peu de temps après la conversation que j’avais eue avec mon tuteur, il me remit un papier cacheté en me disant : « C’est pour le mois prochain, Esther. » J’y trouvai deux cents livres.

Je commençai donc tranquillement à faire les préparatifs qu’exigeait la circonstance ; et, réglant mes achats d’après le goût de mon tuteur qui m’était bien connu, je composai ma garde-robe à son goût, j’eus lieu de croire que j’avais complétement réussi. Je fis tout cela sans en parler à personne, car j’avais bien encore quelques appréhensions de la peine que ce projet d’union avait semblé faire autrefois à Éva ; et d’ailleurs mon tuteur lui-même avait l’air de ne s’occuper de rien. J’avais toujours pensé que notre mariage se ferait sans bruit et le plus simplement possible ; que j’irais dire à Éva : « Voulez-vous venir me voir marier demain matin, chère mignonne ? » c’est du moins ce que je préférais, si le choix m’était laissé.