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encore trouvés sur son passage, il arrête son cheval et demande à un ouvrier s’il connaîtrait par hasard un nommé Rouncewell.

« Ah ! ben, mon maître, répond l’ouvrier, demandez-moi plutôt si j’ me connais moi-même.

— Il est donc bien connu dans ces parages ?

— Rouncewell ! j’ crois ben.

— Et où demeure-t-il ? demande M. Georges en jetant un regard devant lui.

— Est-ce la banque, l’usine ou la maison qu’ vous voulez dire ? demande l’ouvrier à son tour.

— Hum ! Rouncewell est un si grand seigneur, à ce qu’il paraît, murmure le sergent en se frappant le menton du bout de sa cravache, que j’ai bien envie de retourner sur mes pas. Je ne sais trop que faire. Croyez-vous que je trouve à cette heure-ci M. Rouncewell à l’usine ?

— C’est pas toujours facile de savoir où c’ qu’il est ; mais à ce moment-ci d’ la journée vous l’ trouverez à l’usine ou ben son fils ; toutefois s’il est en ville, car c’est ben souvent qu’il est dehors.

— Et quelle est son usine ?

— Vous voyez ben ces cheminées-là ?

— Les plus hautes ?

— Oui, c’est ça. N’ les quittez pas des yeux ; allez tout drêt ; quand vous s’rez au bout, tournez à gauche, vous trouverez un grand mur qui fait tout un côté d’ la rue ; c’est l’usine Rouncewell. »

Le sergent remercie l’ouvrier, et continue sa route en regardant de tous les côtés. Il ne retourne point sur ses pas, et met son cheval à une auberge où dînent en ce moment des ouvriers de Rouncewell, à ce que lui apprend l’aubergiste. C’est l’heure où les forgerons vont dîner, et la ville tout entière paraît avoir été envahie par ceux de M. Rouncewell, tous hommes robustes, vigoureux et noirs comme la suie.

M. Georges suit l’indication qui lui a été donnée ; il trouve une grande porte au grand mur, s’en approche, regarde, et ne voit que du fer autour de lui, à tous les étages et sous toutes les formes : en barres, en lingots et en feuilles ; en cuvettes, en essieux, en rails et en chaudières ; en alluchons, en roues et en manivelles ; du fer et encore du fer ; tordu et brisé de mille façons ; rouillé par l’âge, bouillonnant dans sa jeunesse au milieu de la fournaise ou jaillissant sous le marteau en gerbes d’étincelles ; montagnes de ferraille et débris de machines ; fer