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— Assurément, petite femme. »

Et nous passâmes à autre chose, sans parler toutefois de Bleak-House et de l’avenir qui lui était réservé.

Je recommençai mes visites quotidiennes à ma chère fille qui habitait toujours le coin obscur de Symond’s-Inn. En général c’était le matin que j’allais la voir ; mais toutes les fois que j’avais une heure à moi dans le courant de la journée, je mettais mon chapeau et je courais à Chancery-Lane. À cette heure-là, Richard était presque toujours absent ; le matin, je le trouvais écrivant ou feuilletant les papiers dont sa table était couverte ; parfois je le rencontrais dans le voisinage, attendant à la porte de M. Vholes en mordillant ses ongles ; ou bien errant dans Lincoln’s-Inn, où je l’avais vu pour la première fois. Qu’il était changé depuis cette époque !

Je savais que tout l’argent qu’Éva lui avait apporté fondait avec les chandelles que je voyais brûler dans l’étude de M. Vholes. La somme n’avait jamais été bien forte ; Richard avait des dettes lorsqu’il s’était marié, et il était facile de comprendre que tout allait bon train, à voir M. Vholes pousser à la roue avec tant d’ardeur. Éva conduisait on ne peut mieux son petit ménage et tâchait d’économiser le plus possible ; mais je voyais bien qu’ils s’appauvrissaient de jour en jour.

Elle rayonnait dans cette misérable demeure qu’elle éclairait de sa beauté ; plus pâle et plus sérieuse qu’autrefois, elle conservait néanmoins une sérénité si parfaite, que je la croyais aveuglée par son amour au point de ne pas voir la ruine dont ils étaient menacés.

Un jour surtout que j’étais allée dîner avec eux, j’étais tout entière à cette pensée. J’avais, en entrant dans Symond’s-Inn, rencontré miss Flite qui en sortait ; elle venait de faire une visite aux pupilles de la cour et avait éprouvé la joie la plus vive de cette pompeuse démarche. Éva m’avait déjà raconté que tous les lundis, à cinq heures, l’excellente fille allait lui rendre ses devoirs, ayant au bras ses plus nombreux documents et à son chapeau un nœud d’une blancheur exceptionnelle, qui disparaissait après la cérémonie.

« Miss Summerson ! avait-elle dit en m’apercevant ; je suis enchantée de vous rencontrer. Comment vous portez-vous ? Que je suis heureuse ! Vous allez faire une visite à nos intéressants pupilles. Notre beauté est chez elle, et sera charmée de vous voir.

— Richard n’est pas rentré ? lui dis-je ; car je craignais de me faire attendre.