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Le baronnet tira une carte de son portefeuille, et, prenant son lorgnon, lut avec un grand sérieux et un léger embarras :

« Monsieur… Hirrold… Hérald… Harold Skampling… Skumpl… Je vous demande bien pardon ! Skimpole.

— Le voici, dit mon tuteur en présentant le gentleman.

— Je suis heureux de vous rencontrer, monsieur Skimpole, afin d’avoir l’occasion de vous exprimer personnellement tous mes regrets, répliqua sir Leicester ; j’espère, monsieur, que lorsque vous vous retrouverez dans le voisinage, vous voudrez bien examiner à loisir tout ce qui pourra vous intéresser à Chesney-Wold.

— Vous êtes trop bon, sir Leicester, dit à son tour M. Skimpole ; après une invitation aussi gracieuse, je ne manquerai certainement pas de visiter une seconde fois votre superbe manoir ; les propriétaires de semblables résidences sont des bienfaiteurs publics. Quand ils sont assez généreux pour offrir à l’admiration de pauvres gens comme nous de véritables trésors, il y aurait de l’ingratitude à ne pas profiter de leurs bienfaits.

— Vous êtes artiste, monsieur ? demanda sir Leicester, qui parut approuver hautement l’opinion de M. Skimpole.

— Non, monsieur, répondit celui-ci ; un amateur, un oisif dans toute la force du terme. »

Sir Leicester, plus enchanté que jamais des sentiments de M. Skimpole, exprima l’espoir qu’il avait de se trouver à Chesney-Wold la première fois que celui-ci viendrait dans le Lincolnshire ; et ajouta qu’il avait été d’autant plus contrarié de ne pas avoir reçu notre visite, que M. Jarndyce était une ancienne connaissance de lady Dedlock, même un parent éloigné, qui avait toujours inspiré à milady une profonde vénération. Mon tuteur répondit quelques paroles qui m’arrivèrent confusément ; sir Leicester parla, je crois, de notre rencontre avec milady à la loge du garde, ce fameux jour d’orage, toussa pour ne pas entendre une observation de M. Skimpole à propos de M. Boythorn, et prit congé de nous avec beaucoup de cérémonie.

Je courus m’enfermer dans ma chambre, où je restai quelques instants fort inquiète de mon trouble, et je m’estimai fort heureuse, quand je revins au salon, d’en être quitte pour quelques plaisanteries sur l’impression que m’avait faite l’illustre baronnet. Mais la possibilité de me retrouver en face de ma mère, peut-être l’obligation de lui faire une visite, jusqu’aux politesses de son mari pour M. Skimpole, tout cela m’effrayait au point que je résolus de confier mon secret à mon tuteur, ne me trouvant plus assez de force pour me priver de ses conseils ; je quit-