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tique, d’où il conclut que cette dernière est une femme plus sérieuse qu’il ne l’avait pensé.

« Comment vont nos affaires ? demande-t-elle au baronnet qui sort de table et rentre dans le salon entouré de ses cousins.

— Passablement, répond-il en allant s’asseoir près de la cheminée, où il y a du feu pour lui, bien qu’on soit en été.

— Rien que passablement ! s’écrie Volumnia d’un air de doute.

— J’ai dit passablement, répète sir Leicester d’un ton ferme et avec un certain déplaisir qui sous-entend : Je ne suis pas un homme ordinaire, et quand je me sers d’un mot, on doit savoir que c’est le mot qui convient.

— Ils ne font pas, du moins, d’opposition à votre candidature ?

— Non, Volumnia ; ce malheureux pays a perdu la raison sur bien des points ; je regrette d’avoir à le dire, mais…

— Il n’est pas encore assez fou pour en arriver là. »

Cette interruption fait rentrer miss Dedlock en faveur ; quant à sa remarque, elle était complétement superflue ; sir Leicester ne pose jamais sa candidature aux électeurs, que comme une commande avantageuse qu’ils doivent exécuter promptement, et se contente, pour les deux sièges moins importants qui lui appartiennent, de désigner les individus qui doivent les occuper, en signifiant à ses fournisseurs « de vouloir bien transformer ces matériaux en deux membres du parlement, et de les lui envoyer dès qu’ils seront terminés. »

« Je regrette cependant, Volumnia, continue le baronnet, d’avoir à vous dire que, dans beaucoup d’endroits, le peuple a montré un fort mauvais esprit, et que le gouvernement a rencontré, dans les lieux auxquels je fais allusion, une opposition du plus mauvais caractère.

— Les mmi-sé-rables ! répond miss Dedlock.

— Et même, poursuit le baronnet en promenant son regard sur les cousins dispersés autour du salon, dans la plupart des cas où le gouvernement l’a emporté sur les factieux (notons en passant que les Coodlistes sont toujours des factieux pour les Doodlistes, et réciproquement), la bonne cause, je souffre pour l’honneur de l’Angleterre d’être forcé de l’avouer, la bonne cause n’a triomphé qu’au moyen d’énormes sacrifices ; des centaines de mille livres ! » ajoute le baronnet d’un air profondément indigné.

Si miss Dedlock a un défaut, c’est d’être un peu naïve, qualité charmante à quinze ans, mais tant soit peu hors de mise avec le fard dont elle couvre ses joues.