Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Monsieur Vholes, répond Richard, dont le front se couvre d’une vire rougeur, si quelqu’un m’avait dit, lorsque je vins habiter sa maison, que M. Jarndyce n’était pas l’ami désintéressé qu’il paraissait être alors, et qu’un jour viendrait où j’en aurais la preuve, je n’aurais pas eu de paroles assez fortes pour répondre au calomniateur et je l’aurais défendu contre tous, tant j’avais peu d’expérience ; mais aujourd’hui, je le déclare, il n’est plus pour moi que la personnification du procès ; et plus je souffre, plus je m’indigne contre lui, car il est la cause de ces lenteurs, de ces délais interminables qui font mon désespoir.

— Non, monsieur, non ; vous avez tort de dire cela. Nous devons être indulgents les uns pour les autres ; d’ailleurs je ne dénigre jamais personne, jamais.

— Vous savez pourtant bien, monsieur Vholes, qu’il aurait étouffé l’affaire s’il avait pu.

— Il a manqué d’activité, je le reconnais ; mais peut-être avait-il l’intention de terminer à l’amiable. Qui peut sonder le cœur des hommes, monsieur Carstone ?

— Vous, monsieur Vholes.

— Moi ?

— Assez du moins pour pénétrer ses intentions. Nos intérêts ne sont-ils pas opposés ? dit Richard en frappant sur le pupitre qui sert de base à sa fortune ; répondez, monsieur Vholes.

— Je trahirais votre confiance, répond l’avoué sans changer d’attitude, sans même remuer les paupières, et je manquerais à tous mes devoirs si je disais que vos intérêts sont identiques à ceux de M. Jarndyce ; mais je n’interprète jamais les motifs de personne. Je suis père, monsieur, et je ne scrute pas les intentions des autres ; cependant je ne reculerai jamais devant un aveu lorsque mon devoir l’exige, alors même que cet aveu mettrait la désunion dans les familles. Ce n’est plus à moi que vous parlez, c’est à votre conseiller légal que vous posez la question ; dès lors je n’hésite plus à déclarer que vos intérêts ne sont pas les mêmes que ceux de M. Jarndyce.

— Je le crois bien ! s’écrie Richard ; il y a longtemps que vous me l’avez démontré.

— Monsieur Carstone, j’ai pour principe de ne jamais parler des absents lorsque c’est inutile. Mon désir est de laisser à mes trois filles, avec un nom sans tache, le peu que je dois à un travail persévérant, et je fais tous mes efforts pour conserver l’estime et l’amitié de mes collègues. Je vous ai dit, lorsque M. Skimpole me fit l’honneur de vous amener chez moi, que je ne pouvais pas vous donner de conseils relativement à vos af-