Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/146

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plaisir en entendant sonner la crosse des fusils à terre et retentir la baguette dans le canon de l’arme. Puis après quelques autres commandements, les soldats se mirent immédiatement sur une file et cernèrent entièrement les bâtiments, à la distance d’une dizaine de pas ; du moins Barnabé n’en compta pas davantage entre lui elles soldats qui lui faisaient face. Les cavaliers restèrent à part, à leur place.

Les deux messieurs en habit bourgeois qui s’étaient mis à l’écart avancèrent à cheval avec l’officier au milieu d’eux ; il y en eut un qui tira de sa poche la proclamation et la lut : l’officier somma alors Barnabé de se rendre.

Au lieu de répondre, il alla se placer dans l’embrasure de la porte devant laquelle il montait la garde, et croisa la lance pour se défendre. Après un moment d’un profond silence eut lieu la seconde sommation.

Il n’y répondit pas davantage ; et alors il eut fort à faire de promener ses yeux de tous côtés sur une demi-douzaine d’adversaires qui vinrent immédiatement se poster en face de lui, avant de jeter son dévolu sur celui qu’il devait frapper le premier quand ils allaient se jeter sur lui. Il rencontra les yeux de l’un d’eux dans le centre de la petite troupe, et c’est celui-là qu’il résolut d’abattre, dût-il y perdre la vie.

Encore un silence de mort, puis la troisième sommation.

Le moment d’après il reculait dans l’écurie, distribuant des coups à droite et à gauche comme un enragé. Deux de ses ennemis étaient étendus à ses pieds. Celui qu’il avait choisi pour première victime était tombé d’abord en effet : Barnabé n’avait pas perdu la tête, car il en fit la remarque au milieu du trouble et de l’animation de la lutte. Encore un coup…. encore un homme à bas ! puis à bas à son tour, terrassé, blessé à la poitrine d’un coup de crosse (il l’avait vue tomber sur lui), inanimé…. prisonnier….

Il fut rappelé à lui par un cri de surprise que poussa l’officier. Il se retourna. Grip, après avoir travaillé en secret toute l’après-midi avec un redoublement d’ardeur, pendant que tout le monde était occupé d’autre chose, avait écarté la paille du lit de Hugh, et retourné de son bec de fer la terre fraîchement remuée. Il y avait là un trou qu’on avait négligemment rempli jusqu’au bord, et qu’on avait seulement recouvert d’une couche de terre. Des gobelets d’or,