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BARNABÉ RUDGE

conduisant aux étages supérieurs s’ouvrit, et il en sortit une tête qui, en le voyant, se rejeta en arrière avec précipitation.

« Je voudrais bien, murmura Gabriel s’éveillant au bruit et regardant autour de la salle, je voudrais bien que quelqu’un épousât Miggs, mais c’est impossible ! Je serais fort étonné qu’il y eût un fou assez fou dans ce monde pour épouser Miggs ! »

C’était là un si vaste sujet de réflexions que notre homme s’assoupit encore une fois, et dormit jusqu’à ce que le feu fût entièrement consumé. Enfin il se réveilla de lui même ; et, après avoir fermé à double tour la porte de la rue, selon l’usage, et mis la clef dans sa poche, il alla se coucher.

La salle n’était dans l’obscurité que depuis quelques minutes lorsque la tête apparut encore, et que Sim Tappertit entra, portant à la main une petite lampe.

« Que diable a-t-il donc eu à faire pour me boucher le passage si tard ? marmotta Sim en passant dans l’atelier et mettant sa lampe sur la forge. Voilà déjà la moitié de la nuit d’écoulée ! Chien de métier, de rouille et de ferraille ! je n’y ai jamais gagné, sur mon âme, que cette pièce de clincaillerie. »

En parlant ainsi, il tira du côté droit ou plutôt du gousset de la jambe droite de sa culotte, une grande clef grossièrement fabriquée ; il l’introduisit avec précaution dans la serrure fermée par son maître, et il ouvrit la porte doucement. Cela fait, il remit dans sa poche son chef-d’œuvre clandestin ; puis laissant la lampe allumée, et fermant la porte avec soin et sans bruit, il se glissa dans la rue, aussi peu soupçonné du serrurier dormant d’un profond sommeil, que de Barnabé lui-même en proie aux fantômes de ses rêves.



CHAPITRE VIII.

Lorsqu’il fut hors de la maison du serrurier, Sim Tappertit mit de côté ses manières circonspectes, et, prenant en leur place des airs de tapageur, de fanfaron, de batteur