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monotone de garnison, m’ont également apporté leur part de plaisirs et d’épreuves. Une carrière de ce genre, quand la nature vous a donné un tempérament toujours prêt à vous mettre à l’unisson de ceux qui vous entourent, ne saurait manquer d’avoir sa bonne provision d’aventures. Telle a été la mienne ; et, sans prétendre à autre chose qu’à retracer quelques-unes des scènes dans lesquelles j’ai joué un rôle, et qu’à rappeler le souvenir de leurs autres acteurs… hélas ! dont quelques-uns ne sont plus aujourd’hui… j’ai livré ces pages aux hasards de la publicité.

Si je n’ai pas choisi cette portion de ma vie qui présentait le plus d’incidents et de faits dignes d’être racontés, mon excuse est bien simple ; c’est que j’ai mieux aimé, dans cette première apparition sur les planches, m’accoutumer à l’air de la maison par le personnage du Coq[1] que de me montrer au public dans un rôle plus difficile d’Hamlet.

Mais comme malheureusement il existe en ce monde des gens très-difficiles, qui, ainsi que le dit Curran[2], ne sont pas satisfaits de savoir qui tua le jaugeur, si vous ne pouvez leur apprendre qui portait sa veste de tiretaine… à ceux-là je dirais, en toute humilité, qu’ils n’ont rien à faire avec ce livre. Je n’ai pas plus d’histoire que de morale à offrir ; ma seule prétention à l’une est dans le récit d’une passion qui, pendant quelques années, fut tout l’intérêt de ma vie, mon unique tentative à l’égard de l’autre consiste en

  1. Allusion au coq qui se fait entendre dans le premier acte du drame de Shakspeare.
  2. Célèbre avocat irlandais, de l’époque antérieure à l’Union.