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drait mieux avoir un lion sauvage au milieu d’eux que moi, quand je serai déchaîné. Oh oui ! cela vaudrait mieux pour eux. »

Le chevalier le regarda avec un sourire beaucoup plus significatif qu’à l’ordinaire ; et, lui montrant la vieille armoire, il le suivit des yeux, tandis que Ilugli remplissait un verre et le vidait d’un trait. M. Chesler, derrière le dos de son hôte, sourit d’une façon encore plus significative.

« Vous êtes d’une humeur tapageuse, mon ami, dit-il lorsque Hugh se fut retourné de son côté.

— Moi ? non, maître ! cria Hugh. Je ne dis pas la moitié de ce que je pense. Je ne sais pas m’exprimer. Je n’ai pas ce don. Il y en a assez qui parlent parmi nous ; moi, je serai un de ceux qui agissent.

— Ah ! vous avez donc rejoint ces gaillards-là ? dit sir John de l’air de la plus profonde indifférence.

— Oui ; je suis allé à la maison que vous m’aviez désignée, et je me suis fait inscrire comme recrue. Il y avait là un autre homme nommé Dennis.

— Dennis, ah ! oui, cria sir John en riant. Oui, oui, encore un joli garçon, je crois.

— Un fameux luron, maître, un camarade selon mon cœur, et joliment chaud sur l’affaire en question ; chaud comme braise.

— Je l’ai entendu dire, répliqua sir John négligemment. Vous n’avez pas eu l’occasion d’apprendre quel est son métier, n’est-ce pas ?

— Il n’a pas voulu nous le dire, cria Hugh. Il en fait mystère.

— Ah ! ah ! dit sir John en riant ; un étrange caprice ; il y a des gens qui ont cette faiblesse-là. Vous le saurez un jour, je vous le jure.

— Nous sommes des intimes déjà, dit Hugh.

— C’est tout à fait naturel ! Et vous avez bu ensemble, hein ? poursuivit sir John. Vous ne m’avez pas dit, je crois, où vous êtes allés de compagnie en sortant de chez lord Georges ? »

Hugh ne le lui avait pas dit, et n’avait pas songé à le lui dire ; mais il le lui conta ; et cette demande ayant été suivie d’une longue file de questions, il rapporta tout ce qui s’était