Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 1, Hachette, 1911.djvu/357

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

doigt sur ses lèvres et feignit d’écrire, juste au moment où John Grueby ouvrait la porte.

« Oh ! dit John en passant la tête ; voilà encore un protestant.

— Faites-le attendre ailleurs, John, cria Gashford de sa voix la plus aimable ; je suis occupé, quant à présent. »

Mais John avait amené à la porte le nouveau visiteur, qui entra sans façon, en même temps que Gashford donnait cet ordre. Ce n’était ni plus ni moins que le corps, les traits, le grossier costume et l’air tapageur de Hugh.


CHAPITRE XXXVIII.

Le secrétaire mit la main devant ses yeux pour les garantir de la clarté de la lampe, et pendant quelques moments il regarda Hugh en fronçant le sourcil, comme s’il se souvenait de l’avoir vu naguère, mais sans pouvoir se rappeler en quel lieu ni en quelle occasion. Son incertitude dura peu : car avant que Hugh eût prononcé un mot, il dit, en même temps que sa figure s’éclaircissait :

« Oui, oui, je me rappelle. C’est très bien, John, Tous n’avez pas besoin de rester…. Ne vous dérangez pas, Dennis.

— Votre serviteur, maître, dit Hugh quand Grueby eut disparu.

— Eh bien, mon ami, répliqua le secrétaire de son ton le plus doux, qu’est-ce qui vous amène ici ? Nous n’aurions pas par hasard oublié de payer notre écot ? »

Hugh fit entendre un rire bref à cette plaisanterie, et mettant la main dans les poches de son gilet, il exhiba une des affiches, toute sale et toute crottée d’avoir passé la nuit dehors, la posa sur le pupitre du secrétaire, après avoir commencé par la lisser et par effacer les rides qui s’y voyaient encore, avec la lourde paume de sa main.

« Vous n’avez oublié que ça, maître ; et c’est tombé en bonnes mains, comme vous voyez.