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— À l’amende, pour avoir crié ainsi, dit Hugh. Ha, ha, ha ! une amende, une gentille amende, que vont payer vos lèvres. Tenez, je me paye moi-même. Ha, ha, ha !

— Au secours ! Au secours ! Au secours ! »

Comme elle poussait ce cri perçant avec toute la véhémence qu’elle pouvait y mettre, on entendit un cri répondre au sien, puis un autre, et un autre encore.

« Merci, mon Dieu ! s’écria la jeune fille, dans l’ivresse de la délivrance. Joe, cher Joe, par ici. Au secours ! »

Hugh cessa son attaque, et resta irrésolu pendant un moment ; mais les cris, approchant de plus en plus et arrivant vite sur eux, le forcèrent de prendre une prompte résolution. Il relâcha Dolly, chuchota d’un air de menace : « Vous n’avez qu’à lui conter ça, et vous en verrez les suites. » Puis sautant par-dessus la haie, il disparut en un instant. Dolly s’élança comme une flèche, et courut se jeter tout bellement dans les bras ouverts de Joe Willet.

« Qu’y a-t-il ? Êtes-vous blessée ? Qu’était-ce donc ? Qui était-ce ? Où est-il ? À quoi ressemblait-il ? » Telles furent les premières paroles qui jaillirent de la bouche de Joe, avec un grand nombre d’expressions encourageantes et d’assurances qu’elle n’avait plus rien à craindre. Mais la pauvre petite Dolly était si hors d’haleine et si terrifiée que, pendant quelque temps, elle ne put lui répondre, et resta pendue à l’épaule de son libérateur, sanglotant et pleurant comme si son cœur voulait se briser.

Joe n’avait pas la moindre objection à sentir Dolly suspendue à son épaule ; non, pas la moindre, quoique cela froissât pitoyablement les rubans couleur cerise, et ôtât à l’élégant petit chapeau toute espèce de forme. Mais il ne supporta pas la vue de ses larmes ; cela lui alla au fond du cœur. Il essaya de la consoler, se pencha sur elle, lui chuchota quelques mots, d’aucuns prétendent qu’il lui donna quelques baisers, mais c’est une fable. Quoi qu’il en soit, Joe dit toutes les affectueuses et tendres choses qu’il put imaginer, et Dolly le laissa continuer sans l’interrompre une seule fois, et dix bonnes minutes se passèrent avant qu’elle fût en état de relever la tête et de le remercier.

« Qu’est-ce donc qui vous a effrayée ? » dit Joe.

Un homme, un inconnu l’avait suivie, répondit-elle ; il