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— Vraiment ? interrompit l’autre.

— Et il m’a dit, continua Mimie : ″ Tout ira bien ! ″

— Il a vu ma mère : ah ! que je suis heureuse !

— Espérons, Suzanne, et au revoir !

— Oui, petite sœur, au revoir !

Euphémie et Gaspard se dirigèrent vers le canot, sans échanger une parole.

Gaspard s’étendit nonchalamment à l’avant, laissant à la capitaine Mimie le soin de manier l’aviron.

Quant à Wapwi, avant de revenir par la passerelle, en haut des chutes, il voulut prendre congé à sa façon de Mlle Noël, — c’est-à-dire en frottant la main de la jeune fille contre sa joue.

Mais Suzanne le dispensa de ce cérémonial abénaki, en lui donnant tout bonnement deux gros baisers, bien retentissants, sur les joues et lui disant :

— Va, cher petit, vers ton maître, et raconte-lui ce que tu as vu.

— Oui, petite mère ; et Wapwi lui dira aussi que tu as embrassé un… sauvage.

Cela dit, Wapwi, tout fier de son esprit, détala en riant silencieusement.

Suzanne fit de même, mais avec moins de retenue.

Elle riait encore en arrivant au Chalet.


XIII

LE GUET-APENS ORGANISÉ


Tout dormait chez les Labarou.

La nuit, faiblement éclairée par un mince croissant de lune, était sonore, – si l’on peut employer ces deux mots pour rendre le grand silence de la nature endormie, traversé seulement par le monotone mugissement des cataractes.

Deux heures venaient de sonner.

La fenêtre d’une sorte d’appentis, adossé au mur d’arrière de la maison, s’ouvrit doucement, et une tête brune, coiffée d’une casquette de loup-marin, surgit de l’entrebâillement.

Cette tête tourna à droite, tourna à gauche et se dressa même en l’air, inspectant, écoutant, se rendant compte enfin de tout ce qui pouvait tomber sous deux de ses sens principaux : la vue et l’ouïe.

Satisfait en apparence de son investigation, le propriétaire de la susdite, — maître Gaspard, s’il vous plaît, — mit un pied sur l’appui de la fenêtre et, fort légèrement, ma foi, sauta au dehors, sur le gazon.

Puis il referma silencieusement la fenêtre et s’éloigna à pas de loup.

Arrivé près d’un hangar, servant de remise pour les agrès, seines à pêche, outils de charpentier, etc., notre homme y pénétra, pour en sortir aussitôt avec une hache et une égohine.

Puis, jetant un dernier coup-d’œil sur l’habitation plongée dans le