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Pour tuer le temps, le capitaine proposa à son lieutenant, Labarou, — promu à ce grade après la mort accidentelle du titulaire, arrivée à Madras, — de tenter la fortune.

Celui-ci, plongeur émérite et pouvant rester près d’une minute sous l’eau, y consentit.

Le reste de l’équipage voulut en faire autant…

Quelle idée lumineuse, et à quoi tient la fortune !

En moins d’une demi-journée, chaque plongeur, descendu au fond de l’eau, au moyen d’une corde ayant une grosse pierre attachée à son extrémité, avait recueilli, à la barbe des requins, de pleins sacs d’huîtres, que l’on s’empressa d’ouvrir et dont plusieurs contenaient des perles, que l’on ferait examiner par les marchands du Cap, en passant.

Enfin, un bon vent d’est ayant succédé au calme, on leva l’ancre et… en route pour l’Europe !

Le mois de février commençait, et l’on n’eut pas trop des vingt-huit jours qu’il renferme pour atteindre la côte africaine.

Le 8 mars, l’Albatros mouillait en rade de la ville du Cap.

Dès le lendemain, chacun s’empressa d’aller trafiquer de ses perles avec les joailliers de la Cité aux diamants…

Et, chose étonnante, il se trouva que tous les pêcheurs de l’Albatros avaient en mains des perles d’une grande valeur.

Par un hasard providentiel, le navire canadien avait jeté l’ancre, dans la baie de Condatchy, sur un des bancs les plus riches, en huîtres perlières, de la région.

Quelle aubaine pour ces braves gens, plus accoutumés aux gros sous de cuivre qu’aux belles guinées jaunes et aux scintillants souverains d’or qu’on leur donna en échange des perles de Condatchy !

Bref, quand l’Albatros quitta le Cap de Bonne-Espérance, le 12 mars 1853, tout le monde à son bord était riche, depuis le capitaine jusqu’au dernier des Mathurins salés !

Le voyage de retour se fit sans encombre, et le 8 juin, par une belle matinée ensoleillée, l’Albatros jetait l’ancre dans la rade de Saint-Jean de Terreneuve, où le lieutenant Labarou se sépara de son capitaine, non sans regret.

Mais il avait, arrêté en son esprit, un programme à remplir, et il désirait avoir les mains libres pour arriver à son but.

En effet, son intention était d’acheter, pour son propre compte, une bonne et solide goélette, avec laquelle il ferait, à Kécarpoui, une entrée… dont on garderait le souvenir, sur la côte du Labrador.

Deux jours lui suffirent pour trouver un joli schooner à sa convenance ; et le 10 juin, ayant recruté un équipage de trois hommes, — deux Canadiens et un Français, — il levait l’ancre pour gagner le détroit de Belle-Isle, par où le capitaine Arthur Labarou voulait rentrer chez lui.

La goélette portait un nom significatif…

Elle s’appelait : Le Revenant !