étaient grands, largement fendus, d’un brun velouté, comme les longs cils qui les surmontaient, et susceptibles d’exprimer tour à tour les sentiments de l’âme les plus opposés : douceur, colère, molle langueur, brûlante énergie. Une petite bouche, aux lèvres rouges comme certains coraux, se dessinait gracieusement sur des dents courtes et d’une blancheur éclatante…
Ajoutez à tous ces charmes un nez grec, aux narines mobiles ; couvrez le tout d’une peau d’un blanc mat, animée sur les joues par une imperceptible carnation… et dites avec nous que cette tête de jeune fille était tout simplement ravissante.
En effet, Laure passait à Québec pour un prodige de beauté, et tout le monde était d’accord sur ce point. Tout au plus, les envieuses pouvaient-elles hasarder que cette beauté avait quelque chose de hautain qui paralysait l’admiration.
C’était un peu vrai.
Laure tenait de son père cette expression sévère de physionomie qui la faisait paraître dédaigneuse et – disons le mot – infatuée d’elle-même. Mais hâtons-nous d’ajouter que, si l’enveloppe était froide et le visage de marbre, le cœur n’avait que de nobles passions et demeurait ouvert à tous les grands sentiments.
Une particularité de son caractère avait toujours étonné, non seulement la mère de Laure, mais encore ses amies : c’était la brusque transition de la gaieté la plus expansive à une morne et inconcevable mélancolie qui durait des journées entières.
Cette bizarrerie ne s’était fait remarquer que depuis le retour à Québec de la famille Privat, et avait toujours été s’accentuant, surtout dans les