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sur chacun de ses engins de pêche, se réservant de les appâter au retour, car il avait pour habitude de commencer par ceux du large.

La brillante lumière de son fanal piquait étrangement l’obscurité de la nuit, et cette espèce de feu follet décrivant de folles arabesques sur la grève déserte avait des allures véritablement fantastiques.

Le bonhomme allait toujours, projetant la clarté de sa lanterne en avant de lui pour éclairer ses pas. Mais, chose extraordinaire, son esprit était bien loin de sa besogne. Au lieu de supputer, comme d’habitude, les chances de sa marée et le plus ou moins d’anguilles qui allaient emplir sa glacière, le vieux pêcheur, au contraire, pensait obstinément à ce grand navire à l’ancre dont il voyait distinctement les feux tricolores, à deux milles de là.

Pourquoi ce gros voilier, qui tout à l’heure filait si bien vent arrière, avait-il soudain viré de bord, cargué ses voiles et mouillé à quelques encâblures de la bouée ?…

Pierre Bouet ne pouvait s’en rendre compte ; mais il pressentait quelque malheur, quelque drame, peut-être ! Et ses