En effet, Pierre Bouet n’avait pas de soucis, — sauf peut-être un seul… que bien des gens regardent plutôt comme une faveur signalée : il n’avait pas d’enfants.
À part ce petit désagrément, Pierre Bouet vivait heureux et se trouvait content de son sort.
Et, ma foi, il n’avait pas tort.
Ses foins étaient engrangés en bon ordre depuis un mois ; il avait terminé le jour même la récolte de son avoine et de son seigle, sans oublier celle du sarrasin, des pois et d’une notable quantité de blé, dont les gerbes dorées bondaient sa batterie. Ses patates restaient encore en terre, il est vrai, mais elles avaient une magnifique apparence, et les gelées n’étaient pas à craindre.
Que fallait-il de plus à Pierre Bouet, un des cultivateurs les plus aisés de Saint-François, — petite paroisse fièrement campée sur la pointe orientale de l’île d’Orléans ?
Il était donc heureux… du moins autant que l’insatiable nature humaine le comporte ; et n’eût été cette chagrinante pensée que tout ce bien-être dont il jouissait passerait, après sa mort, faute d’héritier direct, à des collatéraux, Pierre Bouet