Page:Deulin - Les Contes de ma mère l'Oye avant Perrault.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

imité en cela, comme en bien d’autres points, l’auteur de l’Odyssée, qui fait conter par Ulysse à Alcinoüs l’histoire de Polyphème et celle de Circé, lesquelles ne sont pas autre chose que des contes d’ogre et de fée[1]. Mais, à cette époque, il n’était pas encore établi que, comme l’a fort bien dit M. F. Baudry dans la préface des Dieux et les Héros, « la mythologie, au moins dans ses parties essentielles et originales, n’est l’œuvre ni des sages, ni des poètes, mais du peuple et de l’esprit enfantin des hommes primitifs, et qu’elle consista d’abord en traditions populaires allant, à l’occasion, jusqu’aux contes de nourrice. » Cette vérité n’était que vaguement pressentie par quelques rares esprits tels que La Fontaine, Perrault et Fénelon, qui faisait dire impertinemment par Achille à Homère : « L’Odyssée n’est qu’un amas de contes de vieille. »

Peau d’Âne n’eut pas moins de succès que Griselidis, malgré la plaisanterie de Boileau : « Le conte de Peau d’Âne et la femme au nez de boudin, mis en vers par M. Perrault, de l’Académie française ; » malgré le quatrain que le recueil de

  1. Boileau a été au-devant de l’objection. Selon lui, au jugement d’Aristote, « l’Odyssée est un ouvrage tout comique. » Or, il n’y a rien de pareil dans Aristote qui, au contraire, fait sortir la tragédie de l’Odyssée aussi bien que de l’Iliade. Boileau, qui appelle le Roland furieux un poème héroïque et sérieux, confond ici le bas avec le simple, le plaisant avec le naïf.