qui promènent leur baudet aux quatre coins du monde, en criant : « Marchand de blanc sable ! » ou : « A cerises pour du vieux fer ! »
Ce campénaire avait une dévotion particulière à saint Martin. Il donna au petit prince le nom du patron des francs buveurs & l’emmena partout avec lui. Il voyagea encore quelques années de ce côté, après quoi il fut pris du désir de revenir au pays de la bonne bière & des grandes pintes.
Ce n’était point l’affaire du jeune Martin. Le gars trouvait notre ciel trop gris, les gens de chez nous trop rouvelèmes, je veux dire trop vermeils, & il se dépitait de les voir ricaner à l’aspect de sa figure bronzée.
Son père adoptif entrait d’ailleurs plus souvent que par le passé dans les chapelles dédiées à son patron, &, quand il avait récité trop de prières, autrement dit quand il avait bu trop de pintes, il lui arrivait parfois de caresser à coups de fouet les épaules du pauvre petit prince. Cela fit qu’un beau jour, entre chien & loup Martin le planta là devers Cambrai & s’enfuit dans la forêt de Proville.
Il marcha jusqu’à nuit close, tant que, rompu de fatigue & mourant de faim, il avisa une maison isolée. Il y cogna, & une jeune fille vint lui ouvrir.
« Serait-ce un effet de votre bonté, dit-il poli-