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Le Blanc Misseron

dans toute la forêt d’Amblise, il n’était bruit que de l’amitié du mâtin & du blanc misseron.

Par malheur, le pauvre vieux s’affaissait de plus en plus, & il tombait quelquefois dans de longs sommeils, d’où il était difficile de le tirer.

Un jour, le misseron dit à son ami :

« Allons un peu voir du côté d’Onnaing où en eſt la chicorée, » & ils y furent.

En route, comme le soleil piquait & qu’il faisait lourd, le mâtin se sentit las & s’étendit sur le chemin pour dormir un somme.

« Ne te couche pas là, lui cria son camarade. Tu risques d’être escarbouillé. » Le chien dormait déjà si profondément qu’il ne l’entendait plus.

Le pierrot se posa au faîte d’un orme, &, tout en veillant sur son compagnon, il se mit à faire cuic… cuic… cuic… pour se désennuyer.

Dix minutes après, la sentinelle vit venir de loin un bourlat, comme qui dirait un haquet, conduit par Tafarot, le brasseur de Quiévrechain & l’ancien maître du mâtin.

Tafarot était un brasseur fort avancé pour ce temps-là. Il avait, bien avant ses confrères d’aujourd’hui, trouvé le moyen de fabriquer de la bière sans orge & sans houblon ; mais les buveurs d’alors, gens grossiers & qui ne comprenaient pas le progrès, faisaient la grimace & refusaient la