mais ce fut presque de l’extase. Puis nous reprîmes notre marche lentement, encore plus lentement, parce que nous sentions que nos dernières minutes nous échappaient rapidement ; nous sentions que arrivés à la maison où tous reposaient après la longue journée de fatigue du pique-nique, nous devions nous taire et nous séparer. Oh ! comme nous aurions voulu prolonger encore et encore ces dernières minutes qui semblaient être les dernières de notre vie.
Quand nous nous serrâmes la main et que nous nous dîmes, à la porte de la chambre : au revoir, à demain, j’éprouvai un sentiment de tristesse inexprimable ; j’entrai précipitamment dans ma chambre et je me jetai à genoux au pied de mon lit. Les deux mains jointes et tendues vers le crucifix attaché au mur, les yeux fixés sur l’image de l’Homme-Dieu qui avait tant souffert pour avoir tant aimé, je priai avec une dévotion que je ne m’étais pas encore connue. Étaient-ce des remerciements ? Était-ce du désespoir ? Étaient-ce des invocations ? Ce fut tout à la fois, dans une même prière : invocation, désespoir et remerciements. Je l’avais tant aimée et je l’aimais tant ma Rose-Alinda ; et nous devions nous séparer le lendemain, et puis les hasards de la vie sont si cruels parfois. J’aimais tant ma Rose ; elle était tout près de moi et elle n’était pas à moi. Mon Dieu, mon Dieu, vous le savez, je vous ouvris tous les replis de mon cœur : je vous le montrai tel qu’il était avec tout son amour, sa passion, ses désirs, ses pensées, son désespoir, ses espérances. Vous le connaissiez cependant, et je vous en montrais les plaies ; je vous en