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à ce tableau, nos deux cœurs enflammés de l’amour le plus ardent. Nous aurions voulu demeurer éternellement dans cette atmosphère de grandeur, toute chaude et tout imprégnée des effluves de l’amour. Si nous avions pu au moins en jouir pendant des heures ; mais non, les feux du ciel s’éteignaient ; la pourpre se changeait en un rose tendre ; l’or se transformait en argent, et enfin, la pâle et faible lumière du crépuscule disparaissait bientôt sous le gris de la nuit qui estompait le firmament. En même temps un sentiment de mélancolie, de tristesse s’emparait de tout notre être et nous avions hâte maintenant de fuir ces lieux avant que la nuit ne les envahît de peur d’emporter l’image de l’oubli et de la mort.

Nous montâmes dans les voitures qui reprirent le chemin de Beauharnois et de Ste-Martine. Nos attelages avaient cette allure plus vive que prennent les chevaux, le soir, au retour des champs et qui s’en vont à l’étable manger la provende que le fermier leur donnera en chantonnant. Nos amis, dans les différentes voitures, faisaient encore entendre des chants ; mais ces chants n’avaient plus la note claire et presque criarde du matin, car on ne chante pas à la brune comme à l’aurore. Au réveil de la nature, l’âme a des notes plus hautes, plus gaies ; et le soir, quand les ombres de la nuit invitent à la tranquillité et au repos, et même quand la nuit ressemble à un demi-jour, la joie elle-même se manifeste par des accents moins sonores, plus lents et plus en harmonie avec l’heure tardive.

Assis dans la même voiture et à la même place